17 juil. 2013

Rencontre


Thekla Worch-Ambara, directrice du Goethe Institut

 «Ouaga 2013, notre meilleur chantier »

Installé au Burkina Faso depuis 5 ans, le Goethe Institut contribue à la découverte de la Culture allemande et au développement de la nôtre à travers plusieurs collaborations avec des structures locales et diverses activités, notamment des expositions, des projections de films, des soirées de spectacles, etc. Pour connaître davantage cette institution, nous sommes allé à la rencontre de la directrice de cet espace, Thekla Worch Ambara, le lundi 15 juillet 2013 à Ouagadougou.

 


Qui êtes-vous pour nos lecteurs ?

Je suis Thekla Worch Ambara, directrice du Goethe Institut, le Centre culturel allemand qui existe au Burkina Faso depuis 2008.

Comment pouvez-vous présenter davantage cette structure ?

Le Goethe Institut est une structure indépendante qui est chargée officiellement par l’Etat allemand de présenter l’Allemagne au niveau culturel à l’extérieur. Nous avons plusieurs domaines d’actions que sont la coopération culturelle entre notre pays et celui d’accueil, le volet apprentissage de la langue allemande à travers plusieurs activités, dont celle de la bibliothèque du département d’information. Au Burkina Faso tout n’est pas encore bien établi car ce n’est qu’un bureau de liaison pour le moment, qui a juste pour mission la promotion culturelle. Mais j’ai un collègue qui est basé au Mali qui s’occupe de la collaboration avec les établissements. Ici nous travaillons avec les lycées Bogodogo et Mixte de Gounghin à travers la formation des enseignants et bien d’autres activités pour favoriser l’apprentissage de l’allemand.

Quel est l’historique du Goethe Institut en Afrique ?

Le Goethe Institut a été fondé après la seconde Guerre mondiale avec pour but de promouvoir la culture allemande. Nous sommes présent en Afrique il y a plus de 50 ans, notamment dans des pays comme le Cameroun et le Ghana où nous sommes très bien structuré.

Vous êtes la deuxième responsable en 5 ans d’existence du centre au Burkina Faso; quelles sont vos réalisations jusque-là ?

Mon prédécesseur, Peter Stepan, s’était engagé beaucoup dans le domaine des arts plastiques au Burkina Faso et, depuis, je continue dans cette lancée à travers des partenariats avec différentes structures et des artistes individuels, ce qui a permis une certaine émergence de ce volet des arts ici. Il y a un grand dynamisme dans le secteur culturel au Burkina Faso, mais les arts plastiques ne sont pas jusque-là très bien connus comme le cinéma, le théâtre et d’autres arts ; c’est pourquoi on s’est engagé à soutenir ce secteur à travers des expositions, des formations, etc.

Comment se passe votre collaboration avec les autorités politiques du Burkina Faso, notamment avec le ministère en charge de la Culture ?

C’est une très bonne collaboration car on a été très bien accueilli et, à tout moment, elles nous accompagnent en venant assister à  nos évènements. Surtout avec notre projet « Ouaga 2013 » cette année, il y a le ministère de la Culture et du Tourisme avec son département des arts plastiques qui s’est intégré à la création et à la mise en place. Aussi, avec la mairie, nous avons une très bonne collaboration et j’en suis ravie.

Et avec les acteurs culturels dans l’ensemble ?

Nous aimerions bien qu’il y ait plusieurs collaborations ; c’est donc en échangeant avec les différentes structures et artistes qu’ensemble nous créons des projets ; que chaque structure puisse contribuer avec ses moyens. Il y a « Ouaga 2013 » où nous avons pu réaliser un projet en réunissant plusieurs partenaires à travers des discussions. Ce n’est pas toujours facile, mais ça vaut le coup d’intégrer les différents partenaires et de créer ces projets ensemble. Il faut toujours associer les acteurs locaux pour ne pas susciter des programmes qui n’ont aucun impact au Burkina Faso. Il faut avoir une vision qui soutient le développement du secteur, et ces échanges sont très importants.

Quels sont concrètement les acquis que l’on peut retenir ?

Il y a des acquis avec le Centre photographique de Ouagadougou (CPO), la structure Face-o-sceno et, sur le plan des arts plastiques, nous avons la fondation Bras-ouverts, Hangar onze, la villa Yiri suma, etc. Il y a également plusieurs partenariats qui sont là, avec l’association des conteurs et l’Ecole des ancêtres avec un projet régional, la Caravane du conte, qui a déjà eu lieu au Sénégal, au Togo et en Côte d’Ivoire ; cette année c’est au tour du Burkina Faso d’accueillir cet évènement en septembre prochain. C’est une activité qui a été créée en Côte d’Ivoire et notre partenaire au niveau local c’est l’Ecole des ancêtres, qui, d’ailleurs, a participé à l’édition dernière. Nous travaillons aussi avec l’espace Gambidi. C’est souvent des partenariats infrastructurels et, après, d’autres collaborations naissent.

Quel regard portez-vous de façon générale sur la Culture au Burkina Faso ?

J’ai un regard très positif sur la Culture burkinabè car je suis chaque fois impressionnée par le dynamisme et la diversité de la Culture et par l’engagement personnel des acteurs à travers leurs structures et leurs plans d’actions. Je trouve que beaucoup de choses sont très développées ici par rapport à d’autres pays de la région. Il y a le cas du Carrefour international de théâtre de Ouagadougou (CITO) qui a abattu un travail énorme pour avoir un public super et des pièces assez riches. Même en Europe avec le théâtre se pose la question de savoir comment avoir un public plus jeune ; mais le CITO l’a réussi et c’est formidable.

La Culture a été identifiée à travers la Stratégie de croissance accélérée pour le développement durable (SCADD) comme un pilier du développement ; que peut-on attendre de la Coopération allemande à travers le Goethe Institut pour l’atteinte de cet objectif ?

Je ne peux pas parler au nom de la Coopération allemande mais, pour le Goethe Institut, il faut s’attendre à l’appui dans une réflexion artistique. Comment l’art peut contribuer concrètement au développement ? Qu’au travers de ça qu’il y ait le développement du secteur économique, avec les pièces, les œuvres d’art, etc. Nous avons également, à travers les différents volets de notre centre, la possibilité de créer un réseau qui peut contribuer aux échanges pour un développement.

Quel bilan peut-on faire de ce premier semestre 2013 en termes d’activités de votre structure ?

Effectivement, avec la saison pluvieuse, nous sommes en pause ; nous avons eu notre dernière activité du semestre au village Opéra de Laongo. Jusque-là on a eu le projet « Ouaga 2013 », nos projections, qui vont d’ailleurs continuer en septembre ; plusieurs expositions ont eu lieu mais il y a beaucoup d’évènements qui sont en prévision. Avec « Ouaga Hip hop » on va abriter un évènement, en août on accueillera une compagnie de danse en collaboration avec le Centre de développement chorégraphique (CDC) La termitière, il y aura aussi la Caravane du conte dont j’ai parlé tantôt et le Carrefour des arts plastiques. Il sera donc difficile pour moi de faire un bilan maintenant, car il y a encore beaucoup d’autres évènements à venir. Ce que je peux retenir c’est le projet « Ouaga 2013 » où nous avons réussi un certain dynamisme de plusieurs structures.

Quelques journalistes ont bénéficié d’une formation sur la critique d’art en octobre 2012 à travers votre institut ; d’autres initiatives de ce genre sont-elles en prévision ?

Nous n’avons rien prévu de ce genre pour le moment mais nous y penserons.

Quelle est la part que vous accordez, dans vos activités, à la presse culturelle burkinabè?

On propose pour le moment des échanges avec les différents acteurs à travers nos évènements. Nous attendons que notre site se mette en place pour que nous puissions de plus en plus collaborer

Quelles appréciations faites-vous de la participation du public à vos différentes activités ?

Je suis satisfaite ; nous sommes dans une période où nous changeons les différents modules de nos activités qui sont de plus en plus hors du centre mais, dans l’ensemble, ça va. Nous envisageons aller à la rencontre des populations hors de la ville si nous trouvons des espaces appropriés qui ont les équipements adéquats. Néanmoins, il faut noter que notre emplacement en face de l’université permet à beaucoup d’étudiants de participer à nos activités.

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans la réalisation de vos activités ?

Il y a toujours de petites difficultés pour toute chose, mais en général ça va, il n’y a rien de majeur. Les Burkinabè sont ouverts que ce soit au niveau des expérimentations artistiques que d’autres aspects.

Vous êtes directrice de ce centre il y a de cela 1 an et demi ; comment se passe votre intégration ?

En tant que responsable du Goethe Institut il y a effectivement peu de temps, mais je connais le Burkina Faso depuis 2006 pour y avoir fait un stage aux Récréatrales. Ce qui est particulier ici, c’est que tous ceux qui passent une fois ont toujours envie de revenir, à cause de la chaleur humaine ; c’était également mon cas et j’ai eu la chance de revenir en tant que directrice du Goethe Institut. Mais, avant tout, cela je suis revenue plusieurs fois après mon stage. J’ai une petite vision du Burkina Faso qui me sert beaucoup dans mon travail. Je me sens très bien accueillie ici et je suis impressionnée de la manière que la population vit en harmonie malgré les diversités culturelles et religieuses. C’est vraiment merveilleux.

Votre coup de cœur pour la culture burkinabè ?

J’aime beaucoup le théâtre car j’ai étudié les arts dramatiques et j’ai travaillé aux Récréatrales. Ce qui, d’ailleurs, amène beaucoup de gens à me demander pourquoi je n’ai pas assez d’activités théâtrales. Mais  on est déjà sur une lancée que je ne veux pas interrompre. En dehors de la culture, il y a ce paysage hors de la ville qui me fascine énormément.

Quels sont les grands chantiers du Goethe Institut les années à venir ?

C’est d’abord continuer la démarche dans laquelle nous nous sommes inscrit avec les arts plastiques. Aussi, avec des projets comme « Ouaga 2013 », mener des réflexions pour évaluer l’impact de l’art dans l’espace public urbain car l’art ne se crée pas hors d’un contexte. Nous voulons en somme travailler à positionner l’art au Burkina Faso.

Une adresse particulière…

Tout d’abord je dis merci à votre journal et au public ; et je lance une invite à tous les Burkinabè à venir découvrir notre espace qui est ouvert à tous.

Jérôme William Bationo

Photographies à "Ouaga 2013"



« Zaka Flash », une exposition atypique

Le quartier Dassasgho de Ouagadougou abrite depuis quelques jours une galerie assez particulière. Installée par plusieurs structures sous la houlette du Goethe Institut, le vernissage de cette exposition de photographies « dans la rue » a eu lieu le samedi 6 juillet 2013.
 


C’est dans le cadre du projet « Ouaga 2013 » que « Zaka Flash » trône sur des murs de Dassasgho. Initiée par le Goethe Institut et le Centre photographique de Ouagadougou (CPO), cette exposition de photographies entre dans le cheminement des trois thèmes qui seront abordés au cours de cette année. En effet, le CPO, ouvert en février 2013, héberge depuis avril une série d’activités qui durera jusqu’à la fin de l’année. Le projet « Ouaga 2013 », artère principale de ces évènements, à travers des interventions artistiques et des débats autour des thèmes  « Hygiène et assainissement », « Le quartier Dassasgho » et « La mobilité à Ouagadougou », essaie d’élaborer de façon cohérente une vision du futur de la capitale burkinabè et de jeter un regard interrogateur sur le développement de l’assainissement dans celle-ci. C’est une initiative de recherche et d’expérimentation interdisciplinaire entre artistes, experts urbains et la population ; en ce sens que « Zaka Flash », un studio mobile de photographie, s’est installé du 20 au 22 juin 2013 dans trois endroits publics assez atypiques, des dépotoirs de la ville de Ouagadougou, pour des séances de photos. L’exposition issue de cette expérience est d’autant particulière, qu’elle se trouve dans la rue. « L’objectif de cette activité est de créer beaucoup plus d’interaction entre les arts, l’urbanisme  et la population,  tout en l’interpellant sur certaines questions de développement », a confié Thekla Worch-Ambara, directrice du Goethe Institut. Le vernissage de cette exposition à ciel ouvert aura d’ailleurs enregistré la présence de certains dignitaires coutumiers du quartier Dassagho.

Jérôme William Bationo