20 juil. 2016

«Baabou roi» ou «Le roi rien»: Aristide Tarnagda et Wolé Soyinka au CITO



«Baabou roi» ou «Le roi rien»

Aristide Tarnagda et Wolé Soyinka au CITO

Mis en scène par Aristide Tarnagda, le texte de «Baabou roi» est du célèbre dramaturge nigérian Wole Soyinka. «Baabu» qui signifie «rien» ou «terminé» en langue haoussa donne le nom de l’acteur principal, un parvenu, «Baabou roi», «le roi rien» ou «le rien devenu roi», d’une pièce qui interpelle proposée au Carrefour international du théâtre de Ouagadougou (CITO) jusqu’au 17 juillet 2016.

Le Gouatouna, pays fictif, est déchiré par une série de violents coups d'Etat sur fond d'intérêts pétroliers et de «cleptocratie». Sur instigation de sa femme Maariya, le chef d'état-major Basha Bash devient chef d'Etat, puis roi, en renversant le général Potiprout, qu'il avait auparavant aidé à prendre le pouvoir. Après un règne caractérisé par ses lâchetés, ses excès, ses crimes et sa corruption, le roi Baabou meurt d'une overdose de «rhinodisiaque».
Partant de l'histoire non lointaine du Nigeria, cette féroce satire politique de Wole Soyinka dépasse les frontières et s’invite au Burkina à travers Aristide Tarnagda qui en propose une version sur les planches du Carrefour international du théâtre de Ouagadougou. Ici, le nom de Basha Bash ne laisse aucun doute quant aux liens qui existent entre ce personnage fictif et l'ancien dictateur nigérian Sani Abacha qui avait contraint Soyinka à l'exil et avait envoyé au gibet l'écrivain et militant écologiste Ken Saro-Wiwa et ses huit compagnons.
King Baabu du titre original ou «Baabou Roi» est une pièce inspirée «en gros» d'Ubu roi (1896), d’Alfred Jarry. Elle emprunte aussi à Shakespeare et mêle grotesque, horreur et facéties, dans un rythme et une énergie débridés.

Baabou roi, drôle, mais tristement réaliste par certains côtés, est une belle critique des dictatures africaines. Les jeux de mots se succèdent les uns aux autres, les injures burlesques font ressortir l'absurde de certaines situations actuelles en Afrique.
De l’avis du metteur en scène, Aristide Tarnagda, cette pièce est une invite à réfléchir, à comprendre les rouages du pouvoir. Comment certains se font manipuler par d’autres pour atteindre des fins inavouées. Une occasion pour lui, à travers «Baabou roi» de créer donc une communauté de réflexion autour de la question humaine. Toute chose qui a suscité le besoin de partager ce texte d’abord avec ses compagnons sur les planches avec 26 comédiens.

Jérôme William Bationo