«Baabou roi» ou «Le
roi rien»
Aristide Tarnagda et Wolé Soyinka au CITO
Mis en scène par Aristide Tarnagda, le texte de «Baabou roi» est du célèbre
dramaturge nigérian Wole Soyinka. «Baabu» qui signifie «rien» ou «terminé» en
langue haoussa donne le nom de l’acteur principal, un parvenu, «Baabou roi»,
«le roi rien» ou «le rien devenu roi», d’une pièce qui interpelle proposée au Carrefour
international du théâtre de Ouagadougou (CITO) jusqu’au 17 juillet 2016.
Le Gouatouna, pays fictif, est
déchiré par une série de violents coups d'Etat sur fond d'intérêts pétroliers
et de «cleptocratie». Sur instigation de sa femme Maariya, le chef d'état-major
Basha Bash devient chef d'Etat, puis roi, en renversant le général Potiprout,
qu'il avait auparavant aidé à prendre le pouvoir. Après un règne caractérisé
par ses lâchetés, ses excès, ses crimes et sa corruption, le roi Baabou meurt
d'une overdose de «rhinodisiaque».
Partant de l'histoire non
lointaine du Nigeria, cette féroce satire politique de Wole Soyinka dépasse les
frontières et s’invite au Burkina à travers Aristide Tarnagda qui en propose
une version sur les planches du Carrefour international du théâtre de
Ouagadougou. Ici, le nom de Basha Bash ne laisse aucun doute quant aux liens
qui existent entre ce personnage fictif et l'ancien dictateur nigérian Sani
Abacha qui avait contraint Soyinka à l'exil et avait envoyé au gibet l'écrivain
et militant écologiste Ken Saro-Wiwa et ses huit compagnons.
King Baabu du titre original ou «Baabou Roi» est une pièce inspirée
«en gros» d'Ubu roi (1896), d’Alfred Jarry. Elle
emprunte aussi à Shakespeare et mêle grotesque, horreur et facéties, dans un
rythme et une énergie débridés.
Baabou roi, drôle, mais
tristement réaliste par certains côtés, est une belle critique des dictatures
africaines. Les jeux de mots se succèdent les uns aux autres, les injures burlesques
font ressortir l'absurde de certaines situations actuelles en Afrique.
De l’avis du metteur en scène, Aristide Tarnagda, cette
pièce est une invite à réfléchir, à comprendre les rouages du pouvoir. Comment
certains se font manipuler par d’autres pour atteindre des fins inavouées. Une
occasion pour lui, à travers «Baabou roi» de créer donc une communauté de
réflexion autour de la question humaine. Toute
chose qui a suscité le besoin de partager ce texte d’abord avec ses compagnons sur
les planches avec 26 comédiens.
Jérôme William Bationo
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